14 février 2012

« Construire une résistance collective contre les atteintes au droit au chômage ». Observatoire des médias

Observatoire des médias de Belgique

 Nouveau tir à vue éditorial contre les grévistes en Belgique

de Observatoire des médias de Belgique http://www.acrimed.org/article3766.html

Un article précédent (« Grève en Belgique : haro sur les grévistes et les syndicats ») relevait la mobilisation contre les grèves de quelques médias belges. Cette fois, c’est plus précisément d’un éditorial qu’il est question. Certes, les éditorialistes sont libres de dire ce qu’ils veulent. Mais ces préposés aux commentaires officiels dans un journal donnent à celui-ci – comment dire ? – une couleur particulière. Dans le cas présent, le jaune des « briseurs de grève »…
Dans La Libre Belgique, le 31 janvier 2012, lendemain de grève en Belgique, Francis Van de Woestyne éditorialisait sous un titre qui, en soi, est tout un programme : « Au boulot ». Cet éditorial ne se borne pas à prendre parti, sans retenue, pour le gouvernement et le patronat et à faire passer les syndicats pour des irresponsables, il utilise quelques grosses ficelles de la propagande, au sens fort de ce terme. Et même de la propagande de guerre dont les principes élémentaires sont disponibles sur Wikipedia :.
Le court éditorial de La Libre Belgique réussit la prouesse de condenser les principes suivants :
- principe 2 : le camp adverse est le seul responsable de la guerre ;
- principe 3 : le chef du camp adverse a le visage du diable (ou « l’affreux de service ») ;
- principe 4 : c’est une cause noble que nous défendons et non des intérêts particuliers ;
- principe 6 : l’ennemi utilise des armes non autorisées ;
- principe 9 : notre cause a un caractère sacré ;
- principe 10 : ceux (et celles) qui mettent en doute notre propagande sont des traîtres.
Décryptage :
- principe 6 : paralyser le pays, c’est disproportionné. la grève est une arme non autorisée vu les circonstances ;
- principe 2 : ce sont les syndicats qui ont décidé de bloquer le pays. ils n’ont absolument pas été provoqués par des mesures gouvernementales.
- principe 3 : le « souriante » est à la fois ironique et disqualifiant, d’autant qu’elle n’a « évidemment pu empêcher les barrages », accentuant le caractère barbare des hordes qu’elle « patronne » ; « brigades », c’est militaire, c’est organisé ; « d’énergumènes », ça fait peur, ils ne sont pas comme nous ;
- principe 4 : les syndicats défendent des intérêts particuliers. la preuve, les « braves indépendants » ont dû clore leurs volets (on ne sait pas combien ils sont, ni si tous sont contre la grève, mais les syndicats ne les représentent pas). (...)

- principe 10 (magnifique exemple) : question courte, réponse courte, absence totale de nuance. L’énoncé est construit de telle façon qu’on ne peut qu’y adhérer. Or la concertation n’a pas lieu dans des conditions adéquates (puisque le gouvernement joue la montre prétendant être pressé par l’Europe), l’abolition de l’indexation est le fer de lance du patronat – et l’Open VLD (parti du gouvernement) l’a mis sur la table (tiens, on l’a oublié dans l’édito…) ; le maintien de la pension à 65 ans, c’est fallacieux puisque des travailleurs qui pouvaient s’arrêter avant ne le pourront plus (c’est toute la question de la réforme des prépensions !) ;
Paternalisme : vous, syndicats, êtes indispensables mais à certaines conditions, que nous décidons. Rappelez-vous : vous devez défendre la paix sociale (« mais qu’est-ce que vous avez fait hier ? Vous déconnez les gars »), vos actions doivent être constructives (« là, c’est anachronique ce que vous faites »), du coup « bloquer un pays ne sert à rien » ; pour être certain d’être bien compris, on répète : « à rien ».


« D’ici là, au boulot. ». Fabriquer du consentement, c’est en effet tout un boulot…

Nic Görtz


Observatoire des médias http://www.acrimed.org/article3766.html

 Assemblée pour résister ensemble, cinéma Nova, 3 rue d’Arenberg à 1000 Bruxelles - http://www.1000milliards.be/

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